La suffragette du sport féminin Une militante catholique pour le sport féminin
Dès son arrivée à Paris, elle intègre le Rayon Sportif Français (RSF), qui regroupe les sociétés sportives féminines catholiques de la région parisienne. L’année suivante, elle est recrutée comme secrétaire au RSF. En 1934, elle en devient la directrice technique, et enfin la secrétaire générale. Elle forme des cadres, crée des échelons et multiplie par dix le nombre des adhérentes. Fin 1940, sur injonction gouvernementale, la Fédération doit fusionner avec la Fédération de Gymnastique et des Sports des Patronages Français (FGSPF). Elle entre au Comité central et passe secrétaire générale adjointe. Elle n’évolue pas jusqu’à son départ en 1956 ; celui-ci coïncide avec l’arrivée d’un nouveau président, Gilbert Olivier, un catholique très conservateur. Selon J.-M. Jouaret, historien de la Fédération, trois causes peuvent expliquer son éviction : son intelligence et son charisme, son homosexualité et qu’elle soit une catholique engagée dans les instances socialistes. Il lui rend hommage dans un chapitre intitulé «trois femmes d’exception».
(Irène Popard), la natation, l’athlétisme, les sports collectifs, déconseille la boxe et le football. Elle met en place tout un système de propagande par les films (Sportives, L’Appel du stade), un ouvrage, «La Femme et le Sport», des articles, des conférences et l’organisation de grands rassemblements (en juillet 1942, la «Fête de la sportive», organisée au niveau national, rassemble à Paris 5000 participantes et 20 000 spectateurs). Mais en 1942, au moment de l’arrivée de Laval au gouvernement et du durcissement de l’Occupation allemande, Jean Borotra est remplacé par J. Pascot, autoritaire et moins intéressé par le sport féminin. M.-T. Eyquem est mise à l’écart : elle est nommée sous-chef de bureau. Le nombre de pratiquants, et plus encore de pratiquantes, augmente de manière très importante pendant cette période. C’est sans doute la conséquence de cette politique volontariste mais aussi de la volonté d’oublier les rigueurs du temps. A la Libération, le sport étant considéré comme apolitique, elle est classée dans la catégorie «n’ayant pas à comparaître» par la Commission de l’Épuration. Selon Yvette Roudy, «haute fonctionnaire de l’Etat, elle considérait qu’elle servait l’Etat et pas le régime». C’est ainsi qu’elle participe dans les années 1960 à un gouvernement gaulliste.
Là aussi elle connaît deux périodes : très active sous la direction de Maurice Herzog, elle est mise à l’écart sous son successeur (inspectrice principale chargée des Affaires générales et de la Documentation à la DRJS de Paris). Femme d’action, M.-T. Eyquem est aussi une théoricienne, dont l’essai «La Femme et le Sport» figure encore dans les bibliographies des historiens du sport, et une écrivaine : sa biographie sur Pierre de Coubertin (elle est vice-présidente du Comité Pierre de Coubertin de 1956 à 1978) est couronnée en 1966
La revue «Femme du XXe Siècle», qu’anime cette dernière, diffuse ces idées bien au-delà de sa sphère. Son amitié très profonde avec F. Mitterrand y est aussi pour beaucoup, notamment pour l’intégration de la contraception comme thème de campagne lors de l’élection présidentielle de 1965, qui pousse le général de Gaulle à faire adopter une loi (loi Neuwirth, 1967). Le MDF est l’une des sept composantes de la Convention des Institutions Républicaines (CIR), pour le regroupement de la gauche non communiste dans le cadre de la première élection présidentielle au suffrage universel. M.-T. Eyquem assure d’ailleurs le secrétariat général du comité de soutien à la candidature de F. Mitterrand. La mise en ballottage du général de Gaulle est per- çue comme un signe positif par F. Mitterrand qui veut proposer une alternative possible en mettant en place un contre-gouvernement. En 1966. M.-T. Eyquem y est nommée responsable de la promotion féminine, qui ne résiste pas à l’échec aux élections législatives de 1967 (elle-même échoue à Paris, mais dans une circonscription qui n’était pas gagnable). Le MDF adhère, lors du congrès d’Epinay, au nouveau parti socialiste (1971). M.-T. Eyquem exerce au PS de hautes fonctions (de 1975 à 1978, secrétaire nationale en charge des relations avec le monde associatif), mais dans une situation moins favorable que dans la CIR ; Elle se bat pour la place des femmes (politique des quotas dans les listes électorales et les instances dirigeantes). Bien des aspects de la vie de cette personnalité hors du commun ne peuvent être abordés ici ; et beaucoup ont souligné, y compris François Mitterrand, que sa carrière aussi bien professionnelle que politique n’a pas été à la hauteur de son envergure. La commune de La Teste a tenu à l’honorer en donnant son nom à la Maison de la Petite Enfance